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Changer de regard sur la mort et réapprendre à accompagner la fin de vie

A toutes et tous bonjour,

Nous sommes tous des êtres qui allons mourir un jour et malgré cela, pour la plupart, nous nous conduisons comme si nous étions éternels. La seule façon d’avoir réellement prise sur nos propres actes est d’accepter lucidement l’idée de notre propre mort, réalité de laquelle nous nous laissons pourtant distraire si facilement. Sans cette conscience essentielle de notre finitude, notre vie et nos comportements sont impossibles à gérer. Ce défaut de lucidité est loin d’être sans conséquences et est à la racine de grandes souffrances sur lesquelles nous pourrions, pourtant, agir concrètement :

  • le déni de la réalité de la mort,
  • l’écroulement du sens de l’existence pour de nombreux pensionnaires de certaines maisons de retraite,
  • l’interdiction (médicale) de mourir et l'acharnement thérapeutique,
  • la solitude et la souffrance des mourants ... mais aussi des soignants,
  • la fragilisation due au deuil et l’intolérance sociale qui y est associée,
  • la déréliction des rites funéraires,
  • l’absence de transmission entre les générations.

Pour la psychanalyste transgénérationnelle, les représentations de la mort se transmettent dans la succession des générations et comme la construction mentale de l’être humain n’est pas individuelle mais transgénérationnelle, la mort et les deuils familiaux jouent donc un rôle important dans notre construction et notre évolution psychique, mais de toute évidence, la culture occidentale à pour propension de cacher et d’évacuer la mort.
Alors qu’autrefois nous avions des rites réparateurs de séparation et de deuil, dans l’ensemble, ces rites, que l’on retrouve encore - comme nous l’explique Robert Herouet dans son article pour cette newsletter - dans les sociétés traditionnelles ne sont malheureusement plus guère pratiqués de nos jours, ce qui nous empêche, la plupart du temps, de pouvoir parler de la mort avec ceux qui restent.
La médecine occidentale est, une médecine dans laquelle il est, d’une certaine façon, interdit de mourir. Comme elle bénéficie d’une technicité de pointe, elle a tendance à faire vivre arbitrairement les mourants, ce qui a pour danger d’empêcher les vivants de pouvoir leur dire au revoir. Il faut donc rappeler à nos médecins que les vivants doivent pouvoir dire au revoir à ceux qui partent. C’est un besoin fondamental pour la santé mentale et la vitalité des lignées.

Pour toutes ces raisons, j’ai décidé de créer un outil qui soit accessible au plus grand nombre et qui puisse apporter une réponse pratique aux besoins des personnes en fin de vie, de leurs proches et de leurs soignants et ce pendant les différentes étapes qui se succèdent de l’accompagnement de la fin de vie à la clôture du travail de deuil.
Cet outil que j’ai baptisé Commemoria, s’adresse à toutes les personnes qui aimeraient transmettre l’histoire de leur vie à leur descendance et à leurs proches, quelles que soient leur appartenance religieuse ou leurs croyances philosophiques. Il s’adresse aussi à celles et ceux qui souhaiteront accompagner une personne en fin de vie, aider les proches d’un défunt à vivre leur deuil, ou à celles et ceux qui souhaiteraient commémorer un événement collectif. Afin que vous puissiez mieux comprendre ce qui m’a motivé à mener à son terme ce projet intimement lié aux enjeux de la psychanalyse transgénérationnelle, projet que je porte maintenant depuis presque 10 ans, je souhaite partager aujourd’hui avec vous certaines de mes réflexions qui m’on conduit à élaborer cet outil innovant.

Dans l'esprit collaboratif caractéristique de Généasens, je me permets aussi de faire appel aux membres de notre communauté qui le souhaite afin de contribuer à la finalisation du produit en nous faisant parvenir remarques, suggestions ou idées concernant ce sujet ou éventuellement d'autres articles liés à la mort, à son accompagnement et à ses conséquences à travers les générations. D’avance je vous remercie pour votre participation. Si vous souhaitez en savoir plus sur ce projet, je vous invite à visiter le site de Commemoria et à vous inscrire à la newsletter Commemoria.

Comme le mois dernier, je partage avec vous une belle photo de Virgine Delattre qui illustre de manière pertinente le sujet de cette newsletter. Virginie est photographe et anime, chaque jeudi, un atelier intitulé « mémoires vives » qui s'appuie sur la technique du photo-langage. Concrètement, elle propose des photos assez intemporelles qui deviennent la base d’un échange verbal entre les résidents du service de gériatrie de l'hopital Ambroise Paré et elle. Si vous souhaitez en savoir plus sur le travail de Virginie Delattre, vous pouvez consulter l'article qu'elle a publié sur le blog de Commemoria.

Bien cordialement à toutes et tous

Pierre Ramaut
Coordinateur de Généasens

Dictionnaire

  • La mort : enjeux inter et transgénérationnels de Pierre RAMAUT

    En cherchant à éliminer les signes les plus visibles de la mort, en occultant le plus possible son éventualité, nos sociétés occidentales l’ont coupée de l’expérience de la vie. Norbert Élias, grand écrivain et sociologue allemand, a même affirmé qu’un « refoulement des mourants » s’est opéré et qu’il perçoit dans le regard contemporain un sentiment de honte et une répulsion vis-à-vis de ceux qui sont en train de mourir, qui sont portés à se retrancher dans un état intermédiaire « derrière les coulisses de la vie normale ». Ce phénomène s’accompagne d’un manque de formation du personnel soignant, souvent désemparé et impuissant face à des fins de vie qu’il ne sait pas affronter. Dans ce domaine il y a vraiment beaucoup à faire, car cette attitude des soignants ne facilite pas la tâche des mourants. Elle ne facilite pas non plus celle de leurs proches, qui voudraient être proches du mourant, recueillir ses derniers mots, et se sentent souvent frustrés dans leur désir légitime d’échange et de transmission. Pourtant quoi de plus simple et quel meilleur « accompagnement » que de simplement écouter et de tenir la main de quelqu’un qui s’en va ? La compassion ne s’apprend pas.

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  • Rites et rituels funéraires: fonctions, objectifs et bénéfices de Robert HEROUET

    Depuis la nuit des temps, les hommes sont fascinés par la mort. Les premières interrogations métaphysiques de l'homme ont sans doute émergé devant la mort. Devant la mort de l'autre et ensuite devant la prise de conscience de sa propre mort prochaine. C’est le phénomène de la mort qui a sans doute provoqué au sein de la jeune conscience humaine l’émergence de propositions et de questions comme : la mort est-elle inévitable ? quel sens donner à la mort ? et quel sens dès lors donner à la vie ? Qu’y a-t-il après la mort ? N’est-ce qu’un passage vers autre chose ?
    Alors l’homme invente des mythes pour expliquer ce qu’il ne comprend pas, pour donner un sens à tous ces mystères. L’homme va dès lors, dans toutes les traditions, inventer, raconter, partager des mythes sur la mort. Une manière de donner un sens à cette issue fatale et à l’accepter. Mythes qui impliquent symboles, mythes qui impliquent aussi la création et l’usage de rites et de rituels pour régulièrement réactualiser ces mythes, pour révéler ces symboles. Mythes, symboles et rites ont ainsi baigné notre inconscient, et ont, par leur universalité - [tous les peuples ont baigné dans des mythes et rites de cosmogonie, de fertilité, de mort] - , formé cet inconscient collectif et les archétypes associés, racines du psychisme humain. Et ainsi les rituels provoquent en nous des choses que la raison n’explique pas toujours.

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Vidéos

  • Aider nos proches à bien nous quitter par Pierre RAMAUT

    Une intervention de Pierre Ramaut lors du colloque "Le deuil, mémoire vivante" en mars 2013 à Mons en Belgique. Dans cette vidéo, le psychanalyste explique ce qui l'a motivé a porter le projet Commemoria qui est étroitement lié à la mémoire, aux commémorations et à la transmission entre les générations, mais également à des enjeux très importants pour la santé mentale individuelle et collective, qui sont ceux de la psychanalyse transgénérationnelle.

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  • En quoi les rituels sont-ils donc nécessaires et essentiels ? par Robert HEROUET

    Nos sociétés modernes ont réduit le deuil à sa plus simple expression, là où les sociétés traditionnelles favorisaient un travail long et profond qui se terminait par une cérémonie de fin de deuil. Il en est de même pour l’accompagnement aux mourants souvent réduit au déni des familles. La situation est ressentie de même par les encadrants qui sont souvent démunis en termes d’outils. En quoi les rituels sont-ils donc nécessaires et essentiels et pourquoi ceux-ci apportent-ils souvent paix et sérénité ? C’est ce que Robert Herouet a tenté d’expliquer lors d'une journée de réflexion sur l'accompagnement des défunts organisée par l'association Picardie Laïque.

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